C’est un très proche du président Kaïs Saïed qui vient d’annoncer sa démission. Le ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine, un des hommes de confiance du président tunisien, a annoncé vendredi avoir demandé à Kaïs Saïed de mettre fin à ses fonctions. Il dit vouloir se consacrer à ses enfants après le décès de son épouse l’année dernière.
En Tunisie, l’influent ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine a annoncé, vendredi 23 mars, sa démission. En poste depuis octobre 2021, il a indiqué à la presse avoir demandé au président de mettre fin à ses fonctions.
L’homme de 54 ans dit vouloir se consacrer à ses enfants après le décès de son épouse. « Le temps est venu pour que je me consacre à cette responsabilité qu’elle m’a laissée », a ajouté Taoufik Charfeddine. Son épouse, mère de leurs trois enfants, a perdu la vie à la suite d’un incendie causé par une fuite de gaz dans leur résidence.
Pilier de campagne
Cet ancien avocat fut l’un des piliers de la campagne électorale ayant conduit Kaïs Saïed à la présidence en 2019. Taoufik Charfeddine avait ensuite brièvement occupé le portefeuille de l’Intérieur entre septembre 2020 et janvier 2021, avant d’être écarté sous pression du parti d’inspiration islamiste Ennahdha, alors principale force au Parlement, que le chef d’État a finalement suspendu lors de son coup de force de juillet 2021.
Nommé de nouveau à l’Intérieur par Kaïs Saïed en octobre 2021, il a depuis joué à ce poste un rôle de premier plan aux côtés du chef de l’État dans la mise en place d’un nouveau système hyper-présidentialiste, décrié par ses détracteurs comme une dérive autoritaire.
Discours « violent et dangereux »
Des ONG tunisiennes avaient ainsi appelé, le 8 mars, le ministre de l’Intérieur à s’excuser après un discours « violent et dangereux ». Dans une déclaration au vitriol la veille lors d’un déplacement à Ben Guerdane, près de la frontière avec la Libye, le ministre s’en était pris aux « mercenaires des médias, hommes d’affaires, syndicalistes et partis qui ont vendu la patrie ».
« Ce sont des traîtres », avait-t-il ajouté, appelant les Tunisiens à soutenir le président Saïed, « un homme honnête et patriote », selon une vidéo de la visite diffusée par son ministère.
Dans un communiqué conjoint, plus de 30 organisations, dont la centrale syndicale UGTT et la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, ont dénoncé un « discours minable », « sectaire » et qui « crée la division ».
Fustigeant « le langage de menace et d’intimidation » employé, elles ont estimé qu’il s’agissait d’un « discours populiste dangereux qui présage un État policier » rappelant le système en place sous la dictature de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011.
La présidence tunisienne diffusait régulièrement des vidéos des fréquentes réunions entre Taoufik Charfeddine et Kaïs Saïed au palais de Carthage. Lors d’une récente rencontre, le 23 février, Kaïs Saïed avait appelé les autorités à « veiller » sur les migrants originaires d’Afrique subsaharienne, deux jours après avoir suscité un tollé avec un discours jugé « raciste et haineux » en dénonçant l’arrivée en Tunisie de « hordes de migrants » et un complot « pour changer la composition démographique » du pays.
Afrika Stratégies France avec AFP