Le président du Niger demande à la France d’ouvrir une enquête sur les heurts survenus lors du passage d’un convoi de « Barkhane »
Le président nigérien, Mohamed Bazoum, a demandé à la France d’ouvrir une enquête sur les heurts qui se sont déroulés à la fin de novembre sur la route du convoi militaire de la force « Barkhane ». Selon un bilan établi par Niamey, trois personnes avaient été tuées et dix-sept autres blessées, dans des tirs imputés aux forces nigériennes par certains, françaises par d’autres.
« S’agissant des militaires français, j’ai exigé des autorités françaises qu’elles ouvrent une enquête en vue de sanctionner ceux qui ont été coupables d’actes répréhensibles », a expliqué le président nigérien dans un message radio-télévisé à l’occasion du 63e anniversaire de la proclamation de la république dans cette ancienne colonie française.
Ce convoi militaire français, parti d’Abidjan, la capitale économique ivoirienne, devait rejoindre Gao, au Mali, comme cela se produit fréquemment depuis le début de l’intervention française au Sahel en 2013. Mais il est devenu un symbole de l’hostilité à l’engagement armé de la France au Sahel, qui grandit au Mali, au Burkina Faso et au Niger, chez des populations excédées par les violences djihadistes devenues omniprésentes.
Le convoi avait d’abord été bloqué et caillassé à Kaya, dans le centre du Burkina Faso, avant de reprendre sa route quelques jours plus tard et d’être à nouveau interrompu par des manifestants en colère à Téra, dans l’ouest du Niger. Trois d’entre eux avaient été tués dans des tirs dont l’origine reste incertaine. A l’époque, le ministère de l’intérieur nigérien avait expliqué que « des manifestants très violents » avaient bloqué le convoi sous escorte de la gendarmerie nigérienne. Il avait ajouté, sans préciser s’il faisait référence à la gendarmerie ou à la force « Barkhane », que « dans sa tentative de se dégager elle [avait] fait usage de la force ». Le convoi avait finalement pu reprendre la route pour Gao.
Des « dysfonctionnements fâcheux »
Selon M. Bazoum, « des dysfonctionnements fâcheux » du « dispositif du maintien de l’ordre », qui était « largement insuffisant » pour « assurer le passage du convoi militaire français », sont à l’origine de ces heurts. Il a par ailleurs affirmé avoir « ordonné une enquête » par les « services compétents » nigériens « afin d’identifier ces dysfonctionnements et de situer les différentes responsabilités ».
A la suite de ces incidents, le président nigérien avait procédé à des changements sans fournir d’explication : le ministre de l’intérieur, Alkache Alhada, avait quitté ses fonctions, tout comme le haut commandant de la gendarmerie nationale, le général Salifou Wakasso.
Le Niger est confronté aux attaques régulières et meurtrières de groupes djihadistes liés à Al-Qaida et à l’organisation Etat islamique au Sahel dans l’ouest, et à celles de Boko Haram et de l’organisation Etat islamique en Afrique de l’ouest (Iswap) dans le sud-est.
Frontalier du Burkina Faso et du Mali, il est un point de passage régulier de la force française – qui va réduire ses effectifs pour passer de plus de 5 000 aujourd’hui à 3 000 à la mi-2022.
Contrairement aux relations entre la France et le Mali, qui se sont tendues ces derniers mois, les rapports entre Niamey et Paris sont bons. M. Bazoum avait même exprimé, alors que le convoi allait arriver au Niger, sa « reconnaissance » envers la France, dont il saluait les « sacrifices ».
Afrika Stratégies France avec Le Monde Afrique