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France-Maroc : ce nouvel élément qui pourrait disculper Omar Raddad

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Selon les auteurs de « Ministère de l’injustice », paru le 16 mars, une enquête parallèle menée par des gendarmes – et susceptible d’innocenter le jardinier marocain – aurait été ignorée par leur hiérarchie.

C’est une pièce supplémentaire dans le dossier judiciaire complexe de l’affaire Omar Raddad. Paru le 16 mars, Ministère de l’injustice (Grasset, 256 p., 20,90 €), des journalistes Marc Leplongeon, Jean-Michel Décurgis et de la romancière Pauline Guéna, pourrait même permettre d’accélérer l’enquête.

L’ancien jardinier, condamné en 1994 à 18 ans de réclusion pour l’assassinat de Ghislaine Marchal, son ancienne patronne, puis partiellement gracié par Jacques Chirac en 1996, clame toujours son innocence. Son procès doit sa notoriété à l’accumulation de zones d’ombres, dont certaines n’ont jamais été éclaircies.

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Lorsqu’elle a éclaté, l’affaire a divisé l’opinion publique française. Les uns étaient convaincus de la culpabilité du principal suspect, les autres de son innocence, pointant les irrégularités du dossier et dénonçant le caractère raciste du traitement réservé au prévenu. Son avocat de l’époque, le célèbre Jacques Vergès, était allé jusqu’à comparer son client à Alfred Dreyfus (1891-1935).

Nouveau scénario

Ministère de l’injustice, qui relate les coulisses des grandes affaires politico-financières contemporaines, comporte un chapitre intitulé « Omar Raddad, l’enquête secrète ». Le contenu, loin de se contenter d’énumérer une nouvelle fois les asymétries de l’investigation, donne pour la première fois corps à une autre thèse impliquant un restaurateur.

Les résultats de cette enquête interne orientent en effet vers un dénommé « Fernand », un patron de restaurant déjà incarcéré pour tentative d’assassinat, que les gendarmes soupçonnaient à l’époque d’organiser des cambriolages dans la région, et avec qui Ghislaine Marchal avait sympathisé. Les investigations ont par ailleurs établi que Fernand était entouré d’un groupe d’hommes peu recommandables d’origine slave.

« Il existe quelque part une enquête parallèle, menée en secret par des gendarmes chevronnés et dont les magistrats de la Cour de révision n’ont jamais été informés. Cette piste, suivie depuis le mois de septembre 2002, au moment même où le premier recours d’Omar Raddad était examiné, conduit à une bande de voyous slaves », écrivent les auteurs.

L’AVOCATE D’OMAR RADDAD AFFIRME NE PAS IMAGINER « UNE SEULE SECONDE QUE LA COMMISSION D’INSTRUCTION FASSE FI DE CES ÉLÉMENTS D’INFORMATIONS FONDAMENTAUX »

Le 15 mai 2003, dans leur procès-verbal, les gendarmes réclament donc des investigations supplémentaires « susceptibles d’apporter des éclaircissements ou des éléments nouveaux » sur cette piste. N’excluant pas que celle-ci aurait pu mener à une impasse, les auteurs formulent néanmoins une interrogation : « Pourquoi, quand ces investigations secrètes étaient susceptibles d’alimenter la longue enquête autour de de la mort de Ghislaine Marchal, […], a-t-on fait le choix de cacher des informations susceptibles de servir la vérité ? »

« Trou noir »

Interrogé à ce sujet sur l’antenne de RTL, Marc Leplongeon évoque un « trou noir » dans les événements qui suivent la remise des procès-verbaux au parquet de Grasse par les gendarmes, lesquels confirment ne plus jamais avoir eu de nouvelles par la suite.

Si l’hypothèse de l’étouffement est avancée par les auteurs, ces derniers ne disposent pas d’informations suffisantes pour déterminer à quel niveau de la hiérarchie l’affaire s’est éteinte. Ils avancent deux possibilités : la piste judiciaire ou celle des forces de l’ordre.

« Peut-être que la gendarmerie a considéré qu’une enquête qui visait à remettre en cause une enquête initiale effectuée par des gendarmes n’augurait rien de bon. Et de son côté, la justice a elle aussi pu considérer qu’alors que des demandes de révision du procès d’Omar Raddad étaient formulées, remettre en cause tout cela sur la base d’une informatrice anonyme était dangereux », poursuit Marc Leplongeon.

La publication de l’ouvrage intervient peu de temps après la réouverture du dossier par la justice le 16 décembre 2021, après une requête formulée par la défense six mois auparavant, et qui s’appuie sur les progrès effectués par la science sur l’ADN, ainsi que sur une loi assouplissant les critères permettant d’obtenir la révision d’un procès.

Comparer les ADN

Ces révélations peuvent-elles relancer l’enquête ? Contactée par JA, l’avocate d’Omar Raddad, Sylvie Noachovitch, dénonce un « scandale judiciaire ». Elle affirme ne pas imaginer « une seule seconde que la commission d’instruction fasse fi de ces éléments d’informations fondamentaux », et se dit également confiante que les procédures relatives au réexamen du dossier soient accélérées.

Elle réclame que les quatre ADN retrouvés sur la scène de crime – dont aucun n’est celui d’Omar Raddad – soient à présent comparés avec ceux des individus dont les noms figurent dans les PV des gendarmes.

Maître Noachovitch affirme que son client, titulaire d’une carte d’invalidité en raison de sa dépression, « continue de souffrir », et n’a jamais réussi à retravailler depuis le déclenchement de l’affaire. Il réside aujourd’hui à Toulon, et rend ponctuellement visite à sa mère au Maroc.

Afrika Stratégies France avec Jeune Afrique

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