FRANCE : Comment Paris a empêché François Boko de rentrer à Lomé, les dessous
Alors que François Boko, ancien ministre togolais devenu opposant s’est présenté à l’aéroport Charles De Gaulles ce jeudi pour son retour annoncé au Togo, 7 policiers lui ont retiré son passeport brièvement et air France s’est opposé à l’embarquer. La veille, peu avant une interview à Tv5 monde, l’ancien ministre togolais en exil depuis 14 ans avait reçu un message du Quai d’Orsay l’appelant à reporter son voyage et la compagnie prévenue que le vol n’atterrirait pas à Lomé s’il est à bord…
Vers 8h ce matin, François Boko qui était sur le vol de 10h avec escale à Niger pour un arriver à 17h à Lomé, capitale du Togo s’est présenté à l’aéroport Charles de Gaulle de Roissy. A l’aube, l’un de ses contacts à L’Elysée, un ancien militaire français l’a appelé pour insister sur le « respect du report » proposé par la France et qui a été notifié à l’ancien ministre de l’intérieur du Togo la veille. Mercredi, les autorités togolaises ont saisi la compagnie Air France à Lomé pour la prévenir de ce que le vol 861 AF de ce jour n’atterrirait pas à Lomé si François Boko est à bord et ont, par la même occasion menacé de représailles au cas où la compagnie Neerlando-française n’y veillerait pas.
Embarquement refusé
Alors qu’il entame les formalités avec l’un de ses avocats, américain, venu directement des USA pour continuer ensemble le voyage, l’ancien ministre de l’intérieur a été confronté à sept policiers français qui ne semblaient être sur les lieux que pour lui. Ils l’ont facilement repéré, suivi pendant quelques minutes avant de lui retirer son passeport français. Quelques concertations puis le document de voyage rouge bordeaux lui a été remis. Mais il a été empêché de se rendre à Lomé. L’intéressé n’a pas opposé de résistance et a, rapidement, entamé les procédures pour l’annulation de son billet d’avion ainsi que ceux de son avocat et de la demie dizaine de personnes qui devraient rentrer au Togo avec lui. A l’heure où nous mettons cet article sous presse, il est encore en contact avec l’Elysée et le Quai d’Orsay d’autant que jusqu’hier, les Américains qui l’ont exfiltré du Togo avec les Français et qui ont donné leur aval pour son retour n’y « voyait aucun inconvénient » alors que son avocat américain a quitté Washington hier pour Lomé.
Gilbert Bawara à Paris
Parti précipitamment de Lomé le weekend après le séminaire gouvernemental de la semaine dernière à Kara (420 km de Lomé), Gilbert Bawara, ministre de la fonction publique et très proche collaborateur de Faure Gnassingbé s’était rendu à Paris. Porteur d’un message officiel du président togolais, il a fait savoir à l’Elysée lundi ainsi qu’au Quai d’Orsay mardi que le « Togo n’a pas les moyens d’assurer la sécurité de Boko » d’autant que selon lui, l’armée qu’il a désertée en 2005 n’entend pas « le protéger« . A la veille du départ de Boko, hier mercredi, la France qui a fini par céder à la pression togolaise lui a proposé de reporter le voyage pour sa propre sécurité. Mais l’ancien ministre qui n’a pas voulu se soumettre s’est rendu à l’aéroport avant de se voir interdire d’embarquer. Contacté par Afrika Stratégies France, au téléphone, Gilbert Bawara assure « je ne suis pas ministre des affaires étrangères et je ne sais rien de tout ce qui se passe » avant de continuer, ironique, « appelez Monsieur Boko si vous voulez plus d’infos, je n’en sais rien« . Depuis hier mercredi, le ministre de la fonction est de retour à Lomé et coordonne avec Yark Damehane, ministre de la sécurité, le corridor de non retour pour Boko.
A 54 ans, l’ancien chef d’escadron de la gendarmerie (équivalent de commandant en infanterie militaire) en exil devait rentrer au Togo où il annoncera sa candidature pour la présidentielle de mars/avril 2020. Son retour avait été préparé par Washington et Paris mais Faure Gnassingbé, 53 ans et président du Togo depuis 14 ans avait refusé d’avoir tout contact direct avec l’intéressé. Dany Ayida, représentant du National democratic institute (Ndi) à Kinshasa et qui s’est rendu à Lomé depuis 3 jours pour préparer l’accueil de François Boko a dû se cacher, des menaces s’étant multipliées à son égard depuis tôt ce matin.
MAX-SAVI Carmel, Depuis Paris, Afrika Stratégies France