« J’ai signé un décret accordant la grâce présidentielle à Monsieur Laurent Gbagbo, ancien Président de la République. J’ai également demandé qu’il soit procédé au dégel de ses comptes et au paiement de ses arriérés de rente viagère », est l’une des décisions marquantes du discours que le Président Ouattara, a adressé le samedi 06 aout 2022 à Yamoussoukro, à la veille des festivités marquant la célébration des soixante deux ans de l’accession de la Côte d’Ivoire à la souveraineté internationale.
Apaisement et cohésion sociale sont les signes du vent qui souffle ces derniers moments dans l’environnement sociopolitique en Côte d’Ivoire. Il en faut pour contribuer à faire cicatriser les plaies de la grave crise post-électorale de mars 2011 ayant endeuillé le pays à l’emblème de l’éléphant ; notamment les disciples de l’historien Laurent Gbagbo et les partisans de l’économiste Alassane Ouattara. Ce dernier, devenu il y a plus d’une décennie, le locataire du Palais présidentiel au Plateau, n’a cessé de prêcher la réconciliation.
Un « apaisant discours », celui tenu par le Président Ouattara depuis Yamoussoukro, la ville natale de feu le Président Félix Houphouët-Boigny ; la capitale politique du pays retenue pour la célébration des festivités marquant les soixante deux ans de l’accession de la Côte d’Ivoire à la souveraineté internationale. Dans le discours retransmis en direct à la télévision publique, l’ancien gouverneur de la Bceao, a annoncé d’importantes décisions allant dans sa volonté affichée pour le renforcement de la réconciliation nationale.
Acquitté de crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale (Cpi) à la Haye aux Pays Bas, l’ancien président Laurent Gbagbo rentré définitivement au bercail après un exil forcé d’une décennie, est sous le coup d’un dossier judiciaire. Il est condamné depuis 2018 à vingt ans de prison pour le « braquage » de la Banque centrale des états de l’afrique de l’ouest (Bceao) lors des événements des années 2010-2011.
Le Président Ouattara, son rival par un décret lui a accordé la grâce présidentielle et a « demandé qu’il soit procédé au dégel des comptes de son prédécesseur et au paiement de ses arriérés de rentes viagères ». L’ancien directeur Afrique au Fmi a par ailleurs signé un autre décret accordant « la libération conditionnelle » au Vice-amiral Vagba Faussignaux, ancien patron de la marine ivoirienne et au Commandant Jean-Noël Abéhi, ancien chef de l’escadron blindé du Camp Agban, près d’Abidjan qui sont deux anciens responsables militaires proches du Président Gbagbo.
Il a par ailleurs pris un autre décret pour une grâce collective à près de trois mille détenus ivoiriens condamnés pour des infractions mineures. « La Côte d’Ivoire n’abandonnera jamais 49 de nos vaillants soldats, en mission officielle de soutien à la paix au Mali » a également évoqué en parlant des soldats « détenus injustement » depuis le 10 juillet 2022. « Nous mettons tout en œuvre afin qu’ils recouvrent leur liberté ». Une affaire qui pollue actuellement les relations entre le Mali et la Côte d’Ivoire.
Des réformes au profit de la corporation des fonctionnaires
« L’extension du bénéfice de l’indemnité contributive au logement à l’ensemble des fonctionnaires et agents de l’État », fait aussi partie des points importants du discours adressé par le Président Ouattara à ses concitoyens. Jusqu’alors le tiers des fonctionnaires ivoiriens n’est pas bénéficiaire de cette prime. Elle connaîtra ainsi une valorisation de vingt mille francs Cfa et sera étendue aux fonctionnaires, agents de l’Etat de même aux forces de défense et de sécurité. Une autre mesure est celle de la revalorisation de l’allocation familiale. De 2500 francs Cfa par mois et par enfant depuis 1960, elle est désormais revalorisée à 7500 francs Cfa au profit de tous les fonctionnaires et agents de l’Etat de même que les forces de défense et de sécurité.
Une prime exceptionnelle de fin d’année, soit le tiers (1/3) du salaire mensuel indiciaire de base du mois de décembre, sera versée au début du mois de janvier suivant à tous les corps précités. Une subvention de l’Etat à hauteur de 500 milliards de francs Cfa depuis l’année en cours sur les produits pétroliers sans oublier le plafonnement de plusieurs produits alimentaires de première nécessité sont entre autres des mesures prises et contenues dans le discours de l’actuel président ivoirien.
Une véritable décrispation politique pour un renouveau économique ivoirien
Le « miracle ivoirien », ce superlatif collé au pays à l’emblème de l’éléphant en raison de la période économique des années 1960 jusqu’au début de 1990, a perdu de sa superbe avec la disparition de Félix Houphouët-Boigny. Au décès en 1993 du premier président de ce pays producteur de café-cacao, ont suivi des troubles sociopolitiques de toutes sortes. Comme avant les douloureux événements d’entre les années 2010-2011 ; on s’attendait de voir le triumvirat de la scène politique ivoirienne. Ils étaient pourtant ensemble, il y a à peine un mois, les « trois monstres sacrés »
Pourtant invités par l’actuel président Alassane Ouattara à venir prendre part à Yamoussoukro aux festivités marquant les 62è anniversaire de l’indépendance nationale; les deux anciens présidents Henri Konan Bédie et Laurent Gbagbo, ce dernier fraichement grâcié par décret présidentiel n’a pas été aperçu dans les tribunes. Il en est de même du Sphinx de Daoukro. Le Président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci), pour des « raisons personnelles » a « mandaté » une délégation de cinq dirigeants de son parti pour y être. A noter que deux invités de marque à savoir les Présidents George Oppong Weah du Libéria et Umaro Sissoco Embalo de la Guinée – Bissau et par ailleurs Président en exercice de la Communauté économique des états de l’afrique de l’ouest ( Cedeao), ont assisté au défilé des forces vives de la nation ivoirienne.©E.S.
SATCHIVI Ekouévi, Afrika Stratégies France