Les autorités de Brazzaville se donnent un an pour renégocier la créance du pays envers le géant mondial du négoce.
En marge de la conférence African Energy Week, qui se tient du 9 au 12 novembre au Cap, en Afrique du Sud, Bruno Itoua, le ministre congolais de l’Énergie et des Hydrocarbures, a indiqué que le gouvernement espérait parvenir à un accord avec Glencore au cours de l’année à venir. À défaut, Brazzaville n’exclut pas la possibilité de rechercher une tierce partie pouvant racheter sa dette envers le géant anglo-suisse du négoce. « Je n’ai pas perdu l’espoir que nous trouverons une solution avec Glencore », a-t-il indiqué, rapporte l’agence Reuters. « Le moment est idoine (…) et nous espérons ne pas devoir attendre un an pour arriver au bout de tout cela ». Contacté par Jeune Afrique, le groupe Glencore n’a pas souhaité faire de commentaires.
Durcissement des conditions d’accès aux marchés financiers
Entre 2015 et 2016, Glencore – appuyé par un consortium de banques – a accordé un prêt de 850 millions de dollars au gouvernement congolais, censé être remboursé grâce à des livraisons de pétrole sur une période de cinq ans. Ces mécanismes de prépaiement, adossés aux ressources naturelles, sont devenus populaires auprès de certains producteurs africains d’hydrocarbures à la suite de la crise financière de 2008 et du durcissement des conditions d’accès aux marchés de capitaux. Toutefois, la chute des prix du brut est venu compliqué l’équation pour les pays africains. Après une demi-douzaine d’années au-dessus de 100 dollars, le baril de brut a brusquement reculé restant dans une fourchette de 40 à 60 dollars entre 2015 et 2017. Il a depuis lors rarement dépassé 80 dollars.
Une situation qui a durement affecté le Congo-Brazzaville, dont l’endettement est resté supérieur à 100% du PIB ces dernières années, contraignant le pays à renégocier son endettement auprès des traders. Si un accord de principe a été trouvé avec Trafigura, autre géant suisse du négoce, les discussions avec Glencore ont elles pris du retard, des divergences existant notamment quant à la décote que les prêteurs devraient accepter sur le montant de cette dette.
Compte tenu de la taille et la prépondérance de ce type de prêts aux conditions opaques et aux taux d’intérêt élevés, David Mihalyi, économiste au Natural Ressource Governance Institute avait indiqué dans une note datant de juin 2020 que « les négociants en matières premières devraient également se joindre à l’effort mondial d’allègement de la dette ».
Appui du FMI
Le FMI, qui pressait Brazzaville d’obtenir un décote de 30%, est toutefois dans la dernière ligne droite en vue de la signature d’un accord de financement avec le gouvernement congolais. Ce prêt d’une valeur de 456 millions de dollars devrait être soumis à la mise en œuvre de plusieurs réformes pour renforcer la gouvernance et la transparence dans la gestion de ressources publiques et pétrolières du pays. Selon Bruno Itoua, cité par Reuters, l’accord avec le FMI pourrait renforcer la position du pays vis-à-vis de Glencore.
Selon les données de la Banque mondiale, la dette de la république du Congo a atteint 103 % du PIB en 2020. Elle est anticipée à 93% d’ici à la fin 2021. Selon le FMI, en décembre dernier, la dette publique brute dans le cadre des accords de prépaiements pétroliers était estimée à 1,9 milliard de dollars (environ 17,3% du PIB). La dette publique brute du pays était estimée, à la même échéance, à 11 milliards de dollars, dont près de 7 milliards de dollars vis-à-vis de créditeurs extérieurs.
Outre ses négociations avec Brazzaville, Glencore est en discussions avec les autorités tchadiennes. Le négociant doit obtenir l’avant de N’Djamena pour céder ses champs pétroliers dans le pays Tchad à la société pétrolière et gazière française Perenco, a indiqué l’agence Reuters, début novembre, citant un porte-parole de la société. Le géant minier anglo-suisse a acheté ces champs pétroliers en 2014 et les a mis en vente en 2019.
Afrika Stratégies France avec Jeune Afrique