Les délégations des pays membres de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), l’Assemblée législative est-africaine et la Cour régionale d’Afrique de l’Est sont réunies à Nairobi du 17 au 24 janvier pour négocier les termes de l’intégration de la République démocratique du Congo (RDC) au sein de cet espace économique sous-régional des plus intégrés du continent. Les négociations portent sur cinq principaux pôles : la politique, le domaine juridique et institutionnel, les infrastructures, les secteurs productifs et sociaux ainsi que les affaires économiques et commerciales.
Le commerce et l’investissement en pole position
Conduite par le vice-Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères Christophe Lutundula Apala Pen’Apala, la délégation congolaise a de nouveau souligné les visées de ce pays d’Afrique centrale qui s’ouvre sur l’Est. « Nous ne voulons pas toujours parler de nos minéraux. Je pense que tout le monde le sait. […] La RDC compte plus de 90 millions d’habitants. Ce sont des consommateurs. Il y a donc un marché pour la région. Nous travaillerons en harmonie pour faire en sorte que l’Afrique devienne un marché commun », a déclaré Christophe Lutundula Apala au sortir de la première journée de travail.
Entendue sur plus de 2,3 millions de km2 et abritant plus de 105 millions d’habitants, la République démocratique du Congo est effectivement un terreau de matières premières qui veut désormais étendre ses cordages commerciaux et davantage attirer les investisseurs sur ses différents marchés nationaux. Une orientation clairement démontrée récemment à travers les multiples initiatives de coopération sud-sud lancées par le gouvernement. Kinshasa s’est notamment positionné en partenaire économique des autres pays du continent avec la première édition du DRC-Africa Business Forum organisé en novembre avec le soutien de plusieurs organisations internationales dont la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique.
Le plus grand pays francophone au monde porte également plusieurs projets qui nécessitent d’importants investissements dont le vaste projet de fabrication de batteries pour véhicules électriques, visant à mieux tirer parti de ses ressources en cobalt (premier producteur mondial), en lithium et en nickel.
Alors que l’Afrique centrale peine encore à établir une coopération économique forte, la RDC qui partage ses frontières notamment avec cinq pays d’Afrique de l’Est (le Burundi, l’Ouganda, le Rwanda, la Tanzanie, le Soudan du Sud) se rapproche d’un espace qu’elle connait déjà bien.
La concrétisation d’un « vieux » projet
Après une première vie de dix ans jusqu’à sa dissolution en 1977, la Communauté d’Afrique de l’Est est de nouveau lancée en 2000 avec une ambition d’intégration sous-régionale plus forte. Composée aujourd’hui de six pays membres (la Tanzanie, l’Ouganda, le Burundi, le Rwanda, le Soudan du Sud), l’EAC est devenue l’une des organisations sous-régionales les plus intégrées du Continent, à l’instar notamment de la CEDEAO à l’Ouest. Ici, les populations et acteurs économiques jouissent de la libre-circulation et dispose d’un passeport commun leur permettant de se déplacer dans la sous-région. Portés par une coopération économique avancée, les pays membres ambitionnent d’établir une union monétaire, union douanière et un marché commun.
L’adhésion de la RD Congo à l’EAC devrait être effective en avril 2022, soit 12 ans après que la Tanzanie ait exprimé le souhait de voir s’élargir l’espace et d’inviter la RDC à rejoindre la CAE. Quelques temps après son arrivée au pouvoir, le président Félix Tshisékédi a remis le projet au goût du jour. Son passage à la présidence de l’Union africaine (UA) l’a probablement davantage conforté dans l’idée d’associer son pays à une espace économique dynamique.
En juin 2021, Peter Mathuki, Secrétaire général de l’EAC, était à Kinshasa avec une importante délégation sous-régionale afin d’accélérer le processus. Le bloc étant majoritairement constitué de pays bien plus petits, mais très dynamiques sur le plan économique comme le Kenya et le Rwanda, la RDC viendrait incontestablement renforcer ce bloc.
« Le Conseil des ministres de l’EAC est pleinement déterminé à mener ce processus à son terme. Nous devons tous travailler ensemble sans relâche à cette entreprise », a déclaré -en marge des travaux en cours à Nairobi- Adan Mohamed, secrétaire du Cabinet du Kenya pour les affaires de l’Afrique de l’Est et actuel président du Conseil des ministres de l’EAC.
Afrika Stratégies France avec La Tribune Afrique