Avec une croissance de 8% par an depuis 2012, la Côte d’Ivoire, première puissance régionale d’Afrique de l’ouest, a réussi sous la présidence d’Alassane Ouattara, à gagner la confiance des bailleurs de fonds, en transformant et en diversifiant son économie dans le cadre de son vaste programme national de développement 2016-2020. Toutes les études économiques récentes montrent un pays solide économiquement, bien parti pour devenir émergent d’ici 2025. Dans ses perspectives de cette année, qui est décisive, en raison de la présidentielle de fin octobre, Abidjan compte consolider sa transformation structurelle et son dynamisme économique pour préserver ses avancées et acquis. Les grands axes de son budget 2020 en est la bonne illustration.
Avec ses 8% de croissance depuis 2012, l’une des meilleures au monde, la Côte d’Ivoire a pris un nouvel envol économique depuis que l’ancien directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI) pour l’Afrique, Alassane Ouattara, en a pris les rênes. Le pays a en effet tout mis en œuvre pour gagner la confiance des bailleurs de fonds et des investisseurs étrangers. Des moyens colossaux ont été investis pour développer les infrastructures routières mais aussi maritimes, puisque le port d’Abidjan représente 90% des échanges extérieurs de la Côte d’Ivoire. L’assainissement des finances publiques ainsi que l’environnement des affaires se sont améliorées. Selon le rapport Doing Business 2020, du groupe de la Banque Mondiale, rendu public le 24 octobre 2019, il y a eu une amélioration constante des performances économiques de la Côte d’Ivoire en matière de facilitation et de simplification des procédures du cadre de gestion des affaires. Ce n’est donc pas par hasard si le PIB par habitant du pays, qui abrite 26,27 millions de personnes (FMI 2019), est estimé entre 1600 et 1700 usd.
Une agriculture dynamique et diversifiée
Le dynamisme économique du pays résulte en grande partie du développement du secteur agricole, de plus en plus mécanisé et diversifié, privilégiant l’exportation, d’autant qu’elle bénéficie des capitaux des investisseurs étrangers. Premier producteur mondial de cacao (2 millions de tonnes par an, soit 40% de l’offre totale), le pays est aussi leader dans la production de noix de cajou et de kola, mais également de caoutchouc, d’huile de palme, de coton et de café. Le secteur secondaire a aussi contribué à la bonne santé de l’économie ivoirienne avec notamment le boom de l’industrie et du BTP ou encore la hausse de la production minière. De même que le secteur tertiaire grâce aux télécoms et le commerce.
Un gouvernement confronté aux incertitudes politiques de 2020
Si de 2012 à 2019, le bilan économique est positif, la Côte d’Ivoire va devoir maintenir ce cap pour espérer intégrer le cercle des nations émergentes. D’autant que cette année, durant laquelle se tiendra la présidentielle, en octobre prochain, elle est attendue au tournant, par notamment ses partenaires économiques, ou encore les bailleurs de fonds. Les grands projets des investisseurs étrangers pourraient bien être gelés ou réduits jusqu’à octobre voir novembre 2020, le temps d’y voir plus clair concernant l’évolution de la situation post-électorale. Toutefois, à ce stade aucun ralentissement particulier n’est noté.
Le gouvernement, qui sait qu’il n’a pas droit à l’erreur, a prévu dans ses grandes orientations économiques pour cette année en cours de consolider la mise en œuvre de ses actions prioritaires, en l’occurrence ses acquis sur le plan économique. Pour atteindre ses objectifs, il n’a pas hésité à augmenter le budget de cette année qui est de 8061 milliards Fcfa par rapport à celui de 2019, qui était de 7334,3 milliards, soit une hausse de 9,9%. Les secteurs qui permettent de maintenir l’économie en bonne santé ont particulièrement été dotés d’un portefeuille important. La somme allouée à l’administration générale et au développement économique est de 2873,2 milliards de fcfa soit 35,6%, la part la plus importante du budget. Le gouvernement compte aussi renforcer les infrastructures socio-économiques et routières et prévoit d’injecter dans le secteur 1416,8 milliards de Fcfa, soit une part de 17,6% du budget. Le pays mise aussi sur le développement de l’éducation et de la formation qui obtiennent un portefeuille de 1330 milliards de Fcfa, soit 16,5% du budget. Sans compter le renforcement de la sécurité et de la défense, financés à hauteur de 585,8 milliards de Fcfa, soit 7,3% du budget.
Une main tendue aux PME à bout de souffle
Dans les orientations économiques de cette année, les PME ne sont pas en reste. Elles vont également bénéficier d’une main tendue du gouvernement. Confrontées à de grandes difficultés liées à l’insuffisance des financements et de leur accès aux marchés publics et privés, le gouvernement entend les soutenir pour favoriser une croissance économique plus inclusive dans le pays. Il a en effet réussi à réduire de 7,9% la part des marchés de gré à gré au niveau de la commande publique, fin septembre 2019, contre 12,7% à la même période de 2018. Cette baisse devrait continuer au cours de cette année, selon la volonté des dirigeants ivoiriens de voir les structures locales prendre plus de poids. Lors du Conseil des ministres du 11 décembre 2019, à Abidjan, le gouvernement s’est aussi engagé à améliorer leurs mécanismes de financements, à leur octroyer des avantages fiscaux, et à faciliter leur accès aux marchés publics. Il a également tenu à préciser que le montant des marchés publics attribués aux PME est passé de 15,6% à fin septembre 2018 à 46,6% à fin septembre 2019, soit une hausse annuelle de 31 points. D’autant qu’elles constituent 80% du tissu des entreprises et contribuent à hauteur de 20% du produit intérieur brut (PIB).
Longtemps marginalisées au profit des filiales des grosses firmes internationales, implantées à Abidjan, dans la conquête des parts de marchés de l’Etat, désormais les Petites et moyennes entreprises (PME) locales reprennent peu à peu du poil de la bête et gagnent en priorité et en visibilité dans la commande publique. Ces performances sont à mettre à l’actif des structures chargées de la passation des marchés publics dont la direction des marchés publics et l’Autorité nationale de régulation des marchés publics (ANRMP), placées sous l’autorité directe du président de la République. Pour les soulager, ce ne sont pas moins de 771 milliards fcfa que l’Etat de Côte d’Ivoire, via le Ministère de l’Economie et des Finances a dégagés au titre de l’année 2019 pour régler la dette intérieure due aux fournisseurs. Cette tendance de remboursement des dettes intérieures de l’Etat aux PME locales, surtout avec un accent particulier mis au niveau du secteur Education-Formation, sera maintenue dans le budget-programme de cette année.
Un « budget programme » pour plus de transparence dans la gestion publique
Cette année, le gouvernement vise donc à soutenir la mise en œuvre de ses actions prioritaires à travers le renforcement des infrastructures socio-économiques de base, notamment dans les secteurs de l’éducation, de la santé, de l’électrification rurale, de l’accès à l’eau potable, ainsi que de l’accélération de la création d’emplois pour les jeunes en particulier. Le dispositif sécuritaire et de la défense seront aussi renforcés ainsi que l’amélioration des infrastructures de transport. Il contribue, en outre, à la consolidation de la transformation structurelle et du dynamisme de l’activité économique.
Pour atteindre les objectifs de développement, les autorités ivoiriennes insistent sur le respect scrupuleux de la discipline budgétaire et des règles encadrant le nouveau mode de gestion budgétaire : le budget programme, basé sur la gestion axée des résultats précis à atteindre au bout d’une période donnée. C’est avant tout un outil de gestion et de planification qui privilégie la performance. Il combine actions prioritaires à réaliser sous des contraintes de ressources matérielles, financières et humaines.
Initié par l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et adopté lors du Conseil des ministres du 20 mars 2019 à Abidjan, le budget programme a même fait l’objet d’un séminaire gouvernemental animé par le secrétaire d’Etat au Budget, Moussa Sanogo. A mi-parcours de l’exécution de ce budget programme, les différents ministres ou secrétaires d’Etat engagés rendront compte de leurs gestions des fonds alloués à leurs départements devant les élus du peuple au regard d’indicateurs de performances précis. En réalité, le véritable point de rupture dans l’adoption de ce budget-programme, c’est que désormais le contribuable peut suivre la façon dont les finances publiques sont dépensées à travers les comptes-rendus de gestion des différents ministres et secrétaires d’Etat devant les élus du peuple, à l’Assemblée nationale et au Sénat.
Une première pour la Côte d’Ivoire qui, bien que solide économiquement, doit encore fournir des efforts dans le développement social et l’amélioration des conditions de vie de sa population. Au classement 2019 des pays africains, selon l’indice de développement humain (IDH) du programme des nations unies pour le développement (PNUD), elle n’est classée qu’à la 32ème place sur les 54 Etats du continent.
Assanatou Baldé (Paris) et Jean-Marie Kouassi (Abidjan), Afrika Stratégies France
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