Les déclarations du préfet de la congrégation pour les évêques, samedi 15 septembre en Pologne, font suite à d’autres interventions dans l’Église pour réclamer que les laïcs, et notamment les femmes, jouent un rôle plus marquant dans le fonctionnement de l’institution.
Intégrer davantage les femmes au gouvernement de l’Église, à tous les niveaux… Depuis la publication le 20 août de la Lettre du pape au peuple de Dieu, dans laquelle François demande à l’ensemble des baptisés de prendre part à la lutte contre le cléricalisme, terreau des abus de toutes sortes, cette piste revient régulièrement. Dernier en date à l’avoir évoqué, le préfet de la congrégation pour les évêques, le cardinal Marc Ouellet. L’Église « doit faire plus » et « nous aurons besoin de plus de participation de femmes dans la formation des prêtres, dans l’enseignement, dans le discernement, dans le discernement des candidats et de l’équilibre de leur affectivité », a-t-il affirmé devant la presse, samedi 15 septembre, en marge de l’Assemblée plénière de la conférence des épiscopats européens (CCEE) à Poznan, en Pologne. Évoquant la « crise » et la « rébellion » qui touchent l’Église catholique, le cardinal Ouellet a estimé que les femmes doivent participer davantage à la formation des prêtres, pour contribuer à combattre le phénomène de pédophilie dans l’Église.
« Rencontrer ceux dont ils auront la charge pastorale »
Dans la lettre de rentrée qu’il a adressée, début septembre, aux prêtres, diacres, salariés et bénévoles du diocèse de Paris, Mgr Michel Aupetit a exprimé, lui aussi, le souhait que les responsables de séminaires réfléchissent à ce que « les maisons du séminaire puissent accueillir des familles ou des couples dans les maisonnées par le partage de repas, la prière commune. » « Cette expérience complémentaire pourra nous éclairer dans notre discernement d’autant plus si ces personnes sont choisies parmi les fidèles des paroisses attenantes. Les séminaristes pourront ainsi rencontrer ceux dont ils auront plus tard la charge pastorale », ajoutait-il.
Des femmes en responsabilité dans les diocèses
Déjà, en juillet, le cardinal Kevin Farrell, préfet du Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie, dans un long entretien au bimensuel Intercom, édité par la Conférence des évêques catholiques d’Irlande, avait estimé que les laïcs, et notamment les femmes, devraient même être encore plus impliqués dans l’administration même de l’Église. « Nous avions des paroisses avec un budget annuel de 20 millions de dollars : aucun prêtre n’est capable de diriger une paroisse de cette ampleur sans des laïcs compétents », expliquait-il. Dans son ancien diocèse texan, « le chancelier est une femme depuis 20 ans », remarquait-il, et les femmes forment la majorité des responsables diocésains comme des juges du tribunal pour les affaires matrimoniales. Ce mouvement est poussé par le pape François qui, rappelait-il, « met petit à petit des femmes en position de pouvoir » à la Curie romaine, par exemple en désignant des femmes sous-secrétaires du Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie, voire, pour la première fois dans l’histoire de l’Église, comme consulteurs de la Congrégation pour la Doctrine de la foi.
Le risque de « cléricaliser les femmes »
« Où cela va-t-il mener ? » s’interrogeait le cardinal Farrell, qui pointait le danger de « cléricaliser les femmes. Il ne faut pas : elles doivent rester des gens du monde qui vivent dans le monde ». « Petit à petit, cela arrivera à tous les niveaux de l’Église », affirmait-il cependant, expliquant que le pape « a pris conscience que la Curie romaine est surchargée de clercs ». « Les fonctions administratives dans l’Église peuvent être accomplies par tout le monde, expliquait-il. Elles ont été jusqu’ici accomplies principalement par des prêtres, mais peuvent l’être aussi par des laïcs. » Un sujet qui, pour lui, n’a rien à voir avec l’ordination des femmes qui n’est pas, affirmait-il, « une solution pour l’Église » : « Si vous ne faites qu’ordonner une femme, vous aller juste l’isoler, en perpétuant le système sans changer les structures. »
Bruno Bouvet, La Croix