Génocide au Rwanda : la demande de non-lieu d’Agathe Habyarimana jugée « irrecevable »

La cour d’appel de Paris a jugé, lundi 30 août, « irrecevable » pour des questions de forme la demande de non-lieu d’Agathe Habyarimana, soupçonnée d’être impliquée dans le génocide au Rwanda en 1994, a appris l’Agence France-Presse (AFP) de source judiciaire.

Mme Habyarimana est la veuve de Juvénal Habyarimana, président hutu dont l’assassinat, le 6 avril 1994, avait déclenché les massacres contre la minorité tutsi. Mme Habyarimana, 78 ans, est visée depuis 2008 par une enquête en France sur son rôle lors du génocide de 1994, lancée à la suite d’une plainte du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR). Dans le cadre de cette procédure, elle a été placée en 2016 sous le statut de témoin assisté, intermédiaire entre témoin et mis en examen, et n’a plus été interrogée depuis sur les faits.

Mme Habyarimana invoquait le « délai déraisonnable » de l’enquête pour demander aux juges de clore leurs investigations. Ceux-ci avaient rejeté sa demande en novembre, faisant notamment valoir que des actes d’enquête étaient « en cours ». Elle avait alors interjeté appel.

800 000 morts en trois mois

« On occulte le débat au fond pour s’en tenir à des arguties juridiques », a réagi son avocat, Philippe Meilhac, lundi. « C’est un dossier dans lequel on n’a aucun élément nouveau depuis cinq ans et pas davantage depuis sa demande de non-lieu » l’an dernier, a-t-il souligné. « C’est une situation déplorable, car cela bloque toute possibilité de régulariser sa situation administrative », a également ajouté M. Meilhac.

Installée en France depuis 1998, Mme Habyarimana est de fait sans statut légal puisque la France a refusé en 2011 son extradition vers le Rwanda, sans toutefois lui accorder l’asile en raison des soupçons sur le rôle qu’elle a pu jouer dans l’une des pires tragédies du XXe siècle.

Elle est souvent présentée comme l’une des dirigeantes de l’akazu, le premier cercle du pouvoir hutu qui, selon ses accusateurs, a planifié et orchestré le génocide, qui fit plus de 800 000 morts en trois mois. Mme Habyarimana le conteste.

Contacté par l’AFP, Alain Gauthier, cofondateur du CPCR, s’est « réjoui » de la décision de la cour d’appel. « Mais le principal n’est pas dit », a-t-il estimé. « Quelle suite va être donnée à l’information judiciaire dans cette affaire ? Est-ce que la justice française va encore traîner des pieds pendant des années et attendre que Mme Habyarimana disparaisse, comme ça le dossier s’éteindra ? », s’est interrogé M. Gauthier.

 

Afrika Stratégies France avec Le Monde Afrique

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