Au Kenya, à moins d’un an de l’élection présidentielle la Cour d’appel a confirmé ce vendredi l’illégalité du processus de révision constitutionnelle. Cette réforme « Building Bridge Initiative » (BBI) a été engagée par le président Kenyatta en novembre 2019, avec selon lui, l’objectif d’atténuer le système présidentiel actuel du « vainqueur rafle tout » et qui serait à l’origine des conflits post-électoraux.
« Le président n’a pas le pouvoir (…) d’initier des modifications de la Constitution », a conclut le président du tribunal au terme d’une dizaine d’heures de lecture. Un amendement constitutionnel ne peut être initié que par le Parlement ou par initiative populaire a-t-il précisé. En plus de retoquer la proposition de réforme, les sept juges ont estimé que le président Kenyatta pouvait faire l’objet de poursuites civiles pour avoir engagé ce processus.
Uhuru Kenyatta ne peut se présenter à un troisième mandat aux élections d’août 2022, et ses détracteurs estiment que cette réforme avait pour objectif son maintien au pouvoir en tant que Premier ministre. Un maintien à la faveur d’un possible arrangement avec celui qui a été son principal opposant Raila Odinga.
Cette décision vient asseoir l’indépendance des institutions judiciaires selon certains observateurs. « Nous sommes un peuple engagé dans un débat sain pour rendre notre pays meilleur », a tweeté l’ancien vice-président kényan.
Ce n’est pas la première fois que la Cour prend une décision remarquée. En septembre 2017, avait invalidé les résultats de l’élection présidentielle. Une première sur le continent.
Une décision qui fait la Une des médias kenyans
Le journal « The Star » titre « Comment les tribunaux ont sabordé le plan d’Uhuru et Raïla pour 2022 ». Le journal s’appuie sur ses sources qui ont confié que Raïla Odinga envisagerait l’organisation d’un référendum, en supposant bien sûr qu’il remporte l’élection présidentielle de 2022, avant d’ajouter que d’autres observateurs estiment que le temps ne permet pas d’organiser un tel scrutin.
Un autre média, Citizen weekly », s’est, lui, plutôt penché sur les juges en titrant « Rencontrez les 7 juges qui ont stoppé la danse du BBI. » Le média en ligne affiche les visages de ces juges, trois femmes et quatre hommes qui, écrit-il, ont attiré l’attention des Kényans après avoir statué pendant une session qui a duré dix heures, avant de rendre leur décision qui juge illégal le processus de révision constitutionnelle voulu par le président Uhuru Kenyatta.
Une décision saluée dans les réseaux sociaux
Hormis les médias, les Kényans ont aussi salué, sur les réseaux sociaux, cette décision de la Cour d’appel. Ils ont exprimé leur fierté d’appartenir à un pays qui a un tribunal impartial. On peut par exemple lire : « Nous avons besoin d’un courage semblable à celui dont a fait preuve la Haute Cour et la Cour d’appel dans le jugement du BBI, de tous les fonctionnaires e de tous les professionnels. C’est ce qui fera notre Nation. »
Un autre écrit : « Nous, le peuple, sommes les seuls maîtres du congrès et des tribunaux. Non à la révision de la Constitution, oui à la destitution des hommes qui pervertissent la Constitution. La justice a statué. »
Afrika Stratégies France avec RFI Afrique