Docteur en didactiques des sciences, cette femme de réseaux et de lobbying ne lâche pas Ali Bongo. Entre une participation à l’Assemblée Générale de la Campagne Internationale Tournons La Page début juillet à Niamey et un séjour dans le cadre cette même initiative de Secours catholique à Conakry dans la foulée, elle est obsédée par la situation au Gabon et s’acharne pour la fin du système Bongo. Laurence Ndong ne se considère pas comme une opposante mais se réclame plutôt de la société civile, même si ses positions sont largement proches de celle de Jean Ping, ancien président de la commission de l’Union africaine devenu chef de file de l’opposition gabonaise. L’économie faisant partie de ses sujets de prédilection, l’enseignante décrit, chiffres à l’appui, l’état de son pays d’origine sur lequel elle reste très inquiète. Son soutien à Jean Ping semble intact, à « président autoproclamé » de notre journaliste, elle préfère « président élu » pour désigner celui qui affirme avoir remporté la dernière présidentielle à plus de 65%. Si elle concède que Ali Bongo est vivant mais affaibli à 60%, elle attribue les rumeurs de son décès à « la conséquence de l’omerta qui a régné sur son état de santé ». Et malgré les apparitions publiques du président du Gabon, Laurence Ndong n’écarte pas l’existence d’un sosie. Si elle est prolifique, l’interview n’est pas moins dense et aborde tous les sujets. De fond en comble. L’état de santé d’Ali Bongo auquel elle préfère l’ironique et fantaisiste acronyme de BOA (pour Bongo Ondimba Ali), la situation socio-économique du Gabon, l’opposition et la société civile, Jean Ping, la nomination du britannique Lee White au ministère de l’environnement, elle n’évite aucune question. Belle interview. Entretien.
Il y a six mois, vous étiez, lors d’une interview, certaine que Ali Bongo ne reviendra pas au pouvoir, il y est revenu depuis peu, cahin-caha, vos pronostics vous ont-ils trompée ?
Il y a six mois, je vous disais qu’Ali Bongo était incapable de diriger le Gabon. Il l’était avant son accident vasculaire cérébral (Avc) du 24 octobre dernier au regard du bilan on ne peut plus calamiteux de son premier septennat et de la fraude électorale qu’il a dû orchestrer pour se maintenir au pouvoir. Il l’est davantage aujourd’hui tant il est diminué par les séquelles de cet Avc. Je disais à l’époque que le Gabon était suspendu à un cerveau malade d’abord, psychologiquement, psychiatriquement et maintenant anatomiquement. Aujourd’hui, Bongo Ondimba Ali est aveugle, incapable de se déplacer et il a perdu plus de 60% de ses facultés intellectuelles. Il n’est plus apte à occuper une quelconque fonction dans aucune administration, à plus forte raison, les hautes fonctions de président d’un état.
Et c’est là un nouveau drame qui s’abat sur notre pays parce qu’aujourd’hui Ali Bongo ne dirige plus le Gabon, il est entre les mains d’une association de malfaiteurs qui cachent ses méfaits derrière un malade tout en appelant à avoir compassion de ce dernier. Je n’ai pas fait de pronostic, je me suis appuyée sur mes connaissances en biologie. Dans un pays normal, un individu dans l’état où se trouve Bongo ne peut prétendre à la fonction de Président de la République. Cela doit être constaté et les mesures adéquates doivent être prises. Mais malheureusement pour le Gabon, le système a fait de ce pays le lieu de toutes les incongruités, des absurdités jamais vues nulle part ailleurs, le pays où tout ce qui est négatif est porté à son paroxysme pour ce qui est de la mal gouvernance et de la violation de l’État de Droit. Et c’est pour cela que nous nous battons pour chasser ces gens du pouvoir, récupérer notre pays, le remettre à l’endroit et faire de lui la grande nation qu’il a le potentiel de devenir.
En marge de ce sommet de l’Union africaine au cours duquel, vous étiez, tout comme moi, à Niamey, on a beaucoup jasé sur son état de santé. Qu’en est-il exactement ?
D’après les informations dont je dispose, aujourd’hui, Ali Bongo est aveugle, incapable de se déplacer et il a perdu plus de 60% de ses facultés intellectuelles. Ses deux dernières apparitions, le 31 décembre 2018 et le 8 Juin 2019 n’ont trompées personnes. Les séquelles de l’AVC dont il a été victime l’ont considérablement diminué. Ses sbires disent qu’il va bien tout en appelant à la compassion or, compatir signifie partager la souffrance d’un tiers ; comment partager la souffrance de quelqu’un que l’on dit ne pas être en souffrance ? Ils narguent même le peuple en le faisant se pavaner dans une voiture à plus de trois cents mille euros (plus de deux cents millions de FCFA) dans les rues de la ville comme si cela faisait partie des attributs d’un président de la République.
Economiquement, socialement, comment le Gabon se porte-t-il ?
Sur le plan économique, tout le monde sait que le Gabon se porte très mal. Il est sous perfusion du Fmi (Fonds monétaire international, Ndlr) et de la Banque mondiale. Il ne cesse de s’endetter. En Juin 2018, L’agence de notation financière Moody’s a dégradé la note de crédit du Gabon, de B3 dans la catégorie des dettes « hautement spéculative » à Caa1 dans la catégorie des dettes qui présentent un risque substantiel avec une perspective négative. En juin 2019, l’agence Moody’s a maintenu la note de crédit du Gabon à Caa1. Cette notation traduit le fait que l’agence considère toujours l’investissement dans la dette publique gabonaise comme particulièrement risqué et qu’un risque de défaut existe. En 2009 quand Ali Bongo accède au pouvoir, la dette du Gabon est de 1600 milliards de FCFA. Elle représente 18% du PIB, aujourd’hui, cette dette a dépassé les 5000 milliards de FCFA, plus de 50% du PIB mais sur le terrain, il n’y a aucun investissement, pas de route, pas d’école, des hôpitaux inachevés sans plateaux techniques.
Fait très marquant, l’arrivée de Bongo au pouvoir a été marquée par la création des « Agences » dont la plus célèbre « l’Agence Nationale des Grands Travaux d’Infrastructures » (ANGTI). Pendant deux ans, au mépris de la Constitution, Bongo était lui-même Président du Conseil d’Administration de cette agence qui gérait désormais le budget d’investissement de toute l’administration gabonaise. Le 10 juillet dernier, cette agence a mis au chômage technique environ 50% de ses effectifs pour une durée de trois mois. A la place de leur salaire, les agents percevront une indemnité. Évidemment pas contents, les agents concernés ont lancé un mouvement social. Tout ceci après avoir englouti pendant 10 ans le budget d’investissement de tout le pays sans qu’aucune infrastructure ne voit le jour. A titre d’exemple, en 2013, le gouvernement a sorti plus de 20 milliards de FCFA, remis à l’ANGTI pour la réhabilitation et/ou la réfection (noter le flou de la mission) de 60 établissements scolaires, aucun établissement n’a vu le jour, aucun n’a été réhabilité et dans son message à la nation le 31 décembre 2017, Ali Bongo instruisait son gouvernement de rénover les écoles et il est intervenu une en février 2018 pour dire que les écoles gabonaises sont des porcheries, qu’elles ne disposent pas de toilettes et que son instruction de les réhabiliter n’a pas été suivi d’effet. Or, en 2013, c’est lui-même qui était président du Conseil d’Administration de cette agence. Au passage, l’Agence Française de Développement dit avoir investi, entre 2010 et 2017, 800 millions d’euros pour l’éducation au Gabon.
Le conseil des ministres du 16 novembre 2018, présidé par le Vice-Président Pierre-Claver Maganga Moussavou, aujourd’hui limogé, avait entériné la suppression de plusieurs agences avec effet immédiat. Parmi elles, l’Agence Nationale de la Promotion Artistique et Culturelle (ANPAC), l’Agence Nationale de Sûreté et de Sécurité Nucléaire, l’Agence Nationale des Pêches et de l’Aquaculture. L’Autorité de Régulation des Produits Agricoles du Gabon, le Fond Forestier, la Commission Nationale du Développement Durable et même la Société Nationale du Logement Social ont été supprimés. De nombreuses entreprises ont fermé, surtout à Port-Gentil, la capitale économique. La ville en est sinistrée. Dans l’ensemble du pays, le chômage des jeunes dépasse les 35%. Les retraités sont dans la rue depuis plus de 2 mois pour réclamer leurs pensions retraite, le régime leur a envoyé les forces de l’ordre, mieux du désordre, pour les gazer et les réprimer. Le mois dernier, les étudiants ont réclamé leurs bourses, l’armée a ouvert le feu sur eux à balle réelle. Les prisonniers politiques et d’opinion tels que Bertrand Zibi, Landry Amy Washington, Pascal Oyougou et plusieurs autres anonymes sont toujours en prison.
Le prix du carburant a été augmenté quatre fois en une année, à Libreville la capitale, il y a des coupures régulières d’eau et d’électricité, le coût de la vie augmente mais pas les revenus des populations baissent. De nombreuses entreprises et même des fonctionnaires accusent de nombreux mois d’arriérés de salaire. Décrit de la sorte on peut avoir l’impression que le tableau est volontairement noirci alors qu’il n’en est rien. Ce que je viens de relater ne décrit que très sommairement la tragédie que vit le peuple gabonais, un pays d’un million et demi d’habitants avec d’énormes richesses mais dont la population est complètement laissée à l’abandon par ses dirigeants. Ce régime est en guerre contre la population. C’est soit on se fait acheter, soit on souffre en silence. Mais si on ose revendiquer quoique ce soit, c’est la répression assurée. Le pompon se trouve dans la déclaration que Ali Bongo a faite le 8 juin dernier, il y affirme que les institutions du pays sont gangrénées par la corruption et que le pays doit se défaire de la mal gouvernance qui l’empêche d’avancer. Quand celui qui est à la tête d’un pays depuis presque 10 ans et qu’il a succédé à son père qui a régné 42 ans, parle de la sorte, n’est-ce pas un aveu d’échec ?
Est-ce que finalement, l’opposition et la société civile n’ont-elles as épuisé tous les moyens ? Est-ce que le combat peut-il rebondir ?
Pour ce qui est de l’opposition, je ne connais pas sa stratégie, elle doit certainement en avoir une. La société civile continue d’être à pied d’œuvre pour arriver à bout de cette dictature. Vous savez, faire tomber une dictature demande de la stratégie, de la patience et de la persévérance. Le combat a déjà pris une tournure que cette dictature n’avait pas envisagée. Ali Bongo et ses sbires étaient convaincus qu’après la fraude électorale et les massacres qu’ils ont perpétrés, tout le monde allait se tasser, se terrer comme des rats et les laisser continuer à piller le pays, parce que c’est de cela qu’il s’agit, voler, voler et voler. Mais, il n’en a rien été. Cela fait trois ans que nous nous opposons farouchement à ce régime sans rien lâcher. Pensant nous mettre à terre, ces événement d’août et septembre 2016 nous ont mis définitivement debout et nous le resterons jusqu’à ce que ce régime soit mis à terre et il le sera.
Justement, ayant l’impression que rien ne se passe, ces gens continuent de plus belle dans leur gabegie, leur kleptocratie, leur arrogance et leur mépris du peuple, jusqu’au jour où… Tous les peuples sont dociles, jusqu’au jour où… regardez ce qui s’est passé au Burkina Faso, en Egypte, en Tunisie, plus récemment en Algérie et au Soudan. Notre combat rebondira certainement pour la victoire finale et ce sera au moment où personne ne s’y attendra. Croire que les gabonais vont continuer de subir ce régime sans réagir c’est limite leur renier leur humanité. Or, ce sont des êtres humains, ils se sont déjà révoltés plusieurs fois et la prochaine fois sera la bonne. Nous y travaillons.
Il y a trois ans que Jean Ping s’est autoproclamé président élu, avec votre soutien et ceux d’autres acteurs de l’opposition et de la société civile. Est-il pris à son propre piège finalement ?
Jean Ping ne s’est pas auto proclamé Président, il a été élu Président par les Gabonais avec plus de 65% des suffrages exprimés. Il a remporté l’élection dans 7 des neuf provinces du Gabon. La fraude orchestrée par Bongo a été des plus grotesque. Après avoir proclamé les résultats dans 8 provinces sur 9, Jean Ping avait 60.000 voix d’avance sur BOA. Ils ont gonflé les chiffres dans la province du Haut-Ogooué faisant passer la population de 77.000 (recensement de 2013) à 250.000. Les modifications ont été faites sur le site Wikipedia le 31 août 2016 aux alentours de 14h00. Le corps électoral a été porté à 77.000 électeurs qui se sont déplacés aux urnes à 99,93% et ont voté BOA à 95,65% lui donnant ainsi 65.000 voix soit 5.000 voix d’avance sur Jean Ping. Tout ceci est évidemment mathématiquement impossible. Par ailleurs, ils ont dit que dans toute la province, il n’y aurait eu que 47 abstentions or, d’après les procès-verbaux disponibles, dans la seule ville de Moanda, il y a eu plus de 5.000 abstentions. Je vous renvoie à l’émission « Complément d’Enquête » réalisée par la chaine de Télévision France 2 et surtout au rapport de la Mission d’Observation des Élections de l’Union Européenne. Je suis outrée que vous utilisiez l’expression de piège en parlant de Jean Ping. Quel piège aurait-il tendu ? Réclamer sa victoire à une élection est devenu un piège ? Ali Bongo n’a pas fait que voler l’élection à Jean Ping, la nuit du 31 août 2016, il a fait attaquer à l’arme lourde son quartier général de campagne. Le nombre de victimes demeure inconnu puisque les dépouilles ont été emportées et placées dans des fosses communes.
La perversité de cette situation est que les bourreaux sont souvent présentés comme les victimes et les victimes comme les bourreaux. Le vol des élections en dictature est tellement courant que désormais ce sont ceux à qui on vole la victoire qui sont regardés comme des empêcheurs de tourner en rond. C’est comme si on disait d’une jeune femme victime de viol qu’elle tend un piège à ses bourreaux alors qu’elle veut simplement que justice lui soit rendue.
Je crois vous avoir parlé de ce livre paru l’année dernière publié par deux chercheurs de l’Université de Yale aux Etats-Unies d’Amérique, Nic Cheeseman et Brian Klaas et dont le titre est « How to rig an election », en français « Comment truquer une élection ». Sur la quatrième de couverture de ce livre, il est écrit : « Croyez-le ou non, les dictateurs qui volent les élections survivent plus longtemps que ceux qui ne le font pas. Il y a plus d’élections qu’auparavant, mais le monde lui est de moins en moins démocratique. Le nom du jeu pour tous les dirigeants autoritaires est d’apprendre à voler les élections » (la traduction est de moi). Jean Ping est et demeure le président élu par le peuple gabonais, le 27 août 2016.
Plusieurs chefs d’Etat africains, Sassou, Ouattara, Sall et Gnassingbé pour ne citer qu’eux, ont défilé à Libreville au chevet de Bongo, convalescent. C’est une véritable diplomatie sanitaire ?
Vous voyez, c’est ça le comble, toujours faire de l’Afrique une exception dans la bêtise. Depuis quand il existe une diplomatie sanitaire effectuée par des Chefs d’États ? Ces Messieurs sont-ils des médecins ? Un collectif de 10 citoyens gabonais dénommé « Appel à Agir » à saisi la justice gabonaise pour réclamer une expertise médicale de BOA pour dire s’il est toujours à même d’assurer les fonctions de président de la république, ils ont été déboutés en première instance. Ils ont interjeté appel, le procès qui devait se tenir le 15 Juillet 2019 a été reporté motif, Ali Bongo n’aurait pas été informé de la procédure. Mais des chefs d’état débarquent, Ali Bongo ne les accueille pas à l’aéroport, ne donne même pas de conférence de presse avec eux. Chacun d’entre-eux a donné une conférence de presse tout seul dans le palais de Ali Bongo tout en affirmant que ce dernier se porte bien. Où a-t-on vu pareille ineptie ? Ali Bongo ne va pas bien. Il est un légume. Sinon, qu’il vienne donner une conférence de presse en répondant aux questions de la presse nationale et internationale. Ce qu’on attend d’un chef de l’état ce n’est pas qu’il fasse des apparitions muettes sur des vidéos ou de la figuration sur les photos. Il doit gérer le pays, s’exprimer sur les situations les plus graves. Or ça, Ali Bongo ne le fait pas. Il y a eu une tentative de coup d’état le 07 janvier 2019, les élèves sont sortis dans la rue dans tout le pays pour contester les mesures d’attribution des bourses que le gouvernement envisageait de prendre, les retraités sont dans la rue, les étudiants ont grevé, les médecins aussi, il est resté silencieux. Son Vice-président et un ministre d’état ont été accusés et limogés suite un gigantesque scandale de trafic de bois précieux sortis frauduleusement du pays, toujours pas un mot. Qui dirige le Gabon ?
Quelles issues trouvez-vous au Gabon, d’autant qu’un nouveau gouvernement a été installé et tout se passe comme si de rien n’était ?
Ce régime est en place depuis 52 ans, les premiers ministres ont changé, les gouvernements se sont succédés et le pays est en lambeaux. Un gouvernement de plus ou de moins, et quel qu’en soit le nombre de membres, ne changera rien. La seule chose qui n’a pas changé en 52 ans c’est un Bongo à la tête de notre pays. C’est donc la seule chose à faire pour qu’il y ait un début de changement dans notre pays. Je préfère dire que les choses semblent se passer comme si de rien n’était mais c’est juste en apparence. Le Gabon est un champ de mines. Bientôt ils mettront le pied là où il ne faut pas.
Au ministère de l’environnement, un britannique. Comment recevez-vous une telle annonce ? Un blanc ministre au pays de noirs… Rire
Je vois que cette nomination fait sourire plus d’un mais en réalité, il n’y pas de quoi rire. J’ai lu sur les réseaux sociaux que certains comparaient cette nomination à celles de personnalités d’origine africaine dans des gouvernements en France, sauf qu’il y a quelques aspects à considérer : la France a colonisé l’Afrique, un ou une noire dans un gouvernement en France, cela peut être considéré comme une avancée. Mais quand un peuple a été mené en esclavage, colonisé, continue de se battre contre le néocolonialisme, nommer un blanc dans un gouvernement a forcément un goût amer. Au-delà de ses origines, ce qui pose problème, comme pour tous les ministres de ce gouvernement, c’est qu’ils ne sont pas là pour le bien du Gabon mais pour défendre les intérêts du clan au pouvoir et se remplir les poches à leur tour. Par ailleurs, les gabonais gardent un très mauvais souvenir de la plupart des gabonais d’adoption dont s’est entouré Ali Bongo. Les gabonais se souviennent encore de l’arrogance, du mépris que leur témoignait son ancien directeur de cabinet, Maixent Accrombessi, béninois d’origine, aujourd’hui de retour dans son pays d’origine après avoir pillé les caisses de l’état plus que quiconque.
Après ce sommet de l’Union africaine, vous vous rendez en Guinée, dans le cadre de la campagne Tournons la page. Comment peut-on, dans ce pays empêcher un troisième mandat pour Condé ?
C’est à Niamey que je me trouvais pour l’Assemblée Générale Annuelle de la Campagne « Tournons La Page ». Nous tenons souvent nos rencontres en marge de celles de ceux que visent nos actions puisque nous œuvrons pour tourner la page des dictatures, de la mal gouvernance, des successions dynastiques en république en Afrique. Je me suis rendue en Guinée pour accompagner ma fille qui allait assister au mariage d’une de ses amies. Qu’à cela ne tienne, Alpha Condé doit se souvenir de ce pourquoi il s’est battu quand il était président de la Fédération des Étudiants d’Afrique Noire en France (FEANF) et de ce qu’il a dit lui-même concernant la modification de la constitution pour briguer un troisième mandat. Il avait dit qu’il ne le ferait pas. Ces modifications des constitutions n’honorent en rien ceux qui les font, pour peu que l’honneur fasse partie de leurs valeurs. Barack Obama leur a dit, lors de son adresse à l’Union Africaine, qu’il y a une vie après la présidence de la république. Pourquoi risquer la stabilité de tout un pays juste pour s’accrocher au pouvoir. Des voix ont commencé à s’élever, des camarades guinéens ont assisté à la dernière Assemblée Générale de Tournons La Page à Niamey. Ils sont déterminés à lutter contre ce troisième mandat et nous serons à leurs côtés.
Une dernière question, les rumeurs de décès autour de Bongo avaient été amplifiées par la diaspora. Aujourd’hui, c’est évident qu’il est vivant et qu’aucun sosie ne le remplace… Sourire
Vous savez, dans une situation, il est important de ne pas confondre les conséquences et les causes. Les rumeurs sur le décès de Ali Bongo sont la conséquence de l’omerta qui a régné sur son état de santé et qui continue de régner d’ailleurs. Comme tous les peuples, les gabonais ont une histoire. Dans son livre intitulé « Déficit Démocratique et Mal Gouvernance en Francophonie » paru cette année, Edmond Okemvele Nkogho révèle que le Président Léon Mba, Premier président du Gabon, était mort un an avant que son décès ne soit rendu officiel. Bongo est peut-être en vie, mais cela ne permet pas d’affirmer qu’il n’y a pas de sosie. Un exemple simple. Lors de son apparition le 31 décembre 2018, sa paralysie du côté droit était visible. Au moment de son départ de Rabat, le 23 mars 2019, au moment de saluer les personnalités marocaines venues lui dire au revoir, Ali Bongo était incapable de soulever sa main droite. C’est son aide-camp qui la tenait et la lui tendait. Mais, à son arrivée à Libreville, le public payé pour venir l’accueillir a été à distance, même les membres du gouvernement a été tenu à distance et au moment de saluer la foule, ce Ali Bongo a subitement levé très haut le bras droit. Que s’est-il passé dans cet avion ? Durant les apparitions qui ont suivi, ce même bras doit était à nouveau immobile. Non, il y a eu un sosie au moins cette fois-là. En ce moment au Gabon, des syndicalistes sont menacés, raflés, traqués juste pour avoir dit qu’ils ont l’intime conviction que Bongo est mort. S’il est en vie et dirige le pays, pourquoi tant de frilosité sur cette question.
Permettez-moi de rappeler ceci, certains affirment toujours que Bongo est mort, le pouvoir dit que non. Le problème réel est la capacité ou non à assumer la fonction de président de la république or, si Ali Bongo est vivant et si c’est lui qui est sans cesse exhiber par son clan, cet individu on ne peut plus diminué par la maladie ne peut plus assurer les fonctions de président de la république. Il faut déclarer la vacance du pouvoir et enclencher la procédure qui conduira à la tête de l’État un président réellement choisi par le peuple gabonais.
propos recueillis par Yasmina Fadhoum, Afrika Stratégies France