Face aux tensions politiques en Afrique de l’Ouest, l’Union européenne reste prudente mais elle ne dissimule plus ses critiques sur le déroulement des scrutins présidentiels en Côte d’Ivoire et en Guinée.
La réélection proclamée d’Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire a provoqué une réaction en nuances de Bruxelles.
Après l’annonce des résultats, le chef de la diplomatie européenne, Joseph Borrel, a indiqué prendre note des résultats mais il condamne les violences et appelle à une enquête indépendante sur les auteurs de celles-ci.
Dans un communiqué moins diplomatique qu’à l’accoutumée, l’UE relève aussi « les très fortes disparités du taux de participation dans les différentes régions du pays ».
En Guinée, le ton de la réaction marque aussi une préoccupation : l’Union européenne a « pris note » de la réélection annoncée d’Alpha Condé et fait part de ses « interrogations […] quant à la crédibilité du résultat ».
Les violences policières au Nigéria n’ont en revanche pas suscité de déclarations majeures en provenance de Bruxelles.
Pas de désintérêt
Du point de vue de Thilo Schöne, représentant de la Fondation Friedrich Ebert en Côte d’Ivoire (proche du SPD), cette prudence ne signifie pas que l’Union européenne se désintéresse de l’Afrique. Il rappelle par exemple que « l’UE fait partie des acteurs essentiels qui ont tenté d’opérer une médiation entre le pouvoir et l’opposition ces derniers mois et dernières semaines. L’Union européenne a envoyé une mission d’observation électorale mais elle a été limitée à cause de la pandémie de Covid-19. »
Développer le tissu social sur place
L’engagement européen est donc plus vaste que les communiqués diplomatiques ou encore les missions militaires. C’est aussi ce que souligne Robert Kappel. Chercheur sur l’Afrique, il pointe un changement de stratégie, comme annoncé par l’Union européenne en mars 2020: « L’UE mise beaucoup plus qu’auparavant sur le soutien des Africains : des armées, de la société civile… et les Européens abandonnent peu à peu les interventions militaires directes qui n’ont pas vraiment été couronnées de succès ces dernières années. »
Robert Kappel résume le point de vue européen en ces termes : « pour restaurer la paix et la démocratie, il vaut mieux soutenir les forces démocratiques sur place ».
Coopération mise en question côté africain
La coopération avec les structures régionales comme la Cédéao fonctionne bien, également. La Cédéao a d’ailleurs réussi à régler la crise politique en Gambie, en 2017. L’Union européenne se présente alors comme un partenaire qui peut aider à financer certaines missions.
Mais cette coopération avec l’Europe trouve aussi ses limites sur le continent africain, avec un refus croissant de la part des responsables politiques et des citoyens des interventions européennes considérées comme une ingérence.
Afrika Stratégies France avec Deutsche Welle Afrique