L’un des principaux dirigeants de l’opposition en Tanzanie, Tundu Lissu, et deux figures de son parti Chadema, ont été arrêtés par la police avant une manifestation prévue lundi, a annoncé un responsable de Chadema. Début 2023, l’opposition avait déjà organisé de manifestations massives pour demander des réformes électorales pour garantir la crédibilité des élections présidentielles de 2025.
Sa photo est partout sur les réseaux sociaux avec le slogan « Libérez Tundu Lissu », rapporte notre correspondante à Dar-es-Salaam, Élodie Goulesque. L’ancien candidat à la présidentielle et l’un des principaux dirigeants actuels du parti d’opposition Chadema avait encouragé ses troupes à se rassembler dimanche dans la ville de Mbeya, au sud-ouest de la Tanzanie. Cela malgré les avertissements des autorités. Ces dernières avaient décidé d’interdire ce rassemblement, estimant que le risque de débordements violents était trop élevé.
C’est pourt là où Tundu Lissu, John Mnyika, le secrétaire général du parti, et Joseph Mbilinyi, un chanteur populaire et ancien candidat à la députation, ont été appréhendés dimanche, après l’interdiction. Cette décision d’interdiction a été contestée par l’opposition, qui pointe du doigt la tenue d’un événement similaire samedi dernier à Zanzibar, mais organisé par le parti au pouvoir CCM.
Tundu Lissu n’est pas le seul à avoir été arrêté, d’autres membres haut placé de Chadema sont détenus, ainsi que plusieurs centaines de supporters, selon le porte-parole du parti. Le chef de Chadema, Freeman Mbowe a condamné ces arrestations, exigeant la libération immédiate de tous ces sympathisants et dirigeants.
Car John Mrema, directeur de la communication du parti d’opposition, a précisé qu’environ 500 jeunes sympathisants avaient également été interpellés par la police alors qu’ils se rendaient au rassemblement, avant d’être reconduits chez eux. Le parti avait déclaré qu’environ 10 000 jeunes devaient se réunir à Mbeya pour célébrer la Journée internationale de la jeunesse sous le slogan « Prenez en charge votre avenir ».
« Nous exigeons la libération immédiate et inconditionnelle de tous nos dirigeants »
Début 2023, les villes de Dar-es-Salam, Mwanza, Mbeya et Arusha avaient été gagnées par des manifestations massives. Cela en amont de la présidentielle de 2025.
Le chef de Chadema, Freeman Mbowe, a « fermement » condamné ces arrestations. « Nous exigeons la libération immédiate et inconditionnelle de tous nos dirigeants, membres et sympathisants qui ont été arrêtés dans différentes régions du pays », a-t-il déclaré sur X. « Le parti suit de près la situation et continuera d’informer le public de chaque évolution étape par étape », a-t-il poursuivi.
Le parti en appelle directement à la présidente du pays Samia Suluhu Hassan qui, contrairement à son prédécesseur, avait montré plus de souplesse quant à la présence d’une opposition plus active en Tanzanie. Mais ces arrestations inquiètent alors que le pays se prépare à des élections locales en fin d’année et présidentielle l’an prochain.
« Inquiétant »
Tundu Lissu, figure de l’opposition dans le pays d’Afrique de l’Est, est rentré en Tanzanie en janvier 2023, après plus de cinq ans d’exil. Il avait pris cette décision quelques jours après l’annonce de la levée l’interdiction des meetings politiques d’opposition par la présidente Samia Suluhu Hassan. Critique virulent du parti au pouvoir Chama Cha Mapinduzi (CCM), Tundu Lissu était revenu brièvement en Tanzanie en 2020 pour concourir à l’élection présidentielle face au président John Magufuli, qu’il avait qualifié de « dictateur ».
La victoire du sortant – avec un score officiel de 84 % des voix – avait été contestée par l’opposition, qui avait appelé à manifester. Après le scrutin, Tundu Lissu avait reçu des menaces de mort et s’était alors réfugié chez des diplomates étrangers avant de pouvoir quitter le pays.
Après la mort soudaine du président John Magufuli, surnommé le « Bulldozer », en mars 2021, Samia Suluhu Hassan, qui lui a succédé, est revenue sur plusieurs des politiques les plus controversées de son prédécesseur et a promis des réformes réclamées de longue date par l’opposition.
Mais l’optimisme suscité par ces premières décisions avait été quelque peu douché par l’arrestation en juillet 2021 du président de Chadema Freeman Mbowe et de trois responsables du parti à Mwanza (ouest), où ils devaient participer à un rassemblement demandant des réformes constitutionnelles.
L’élection présidentielle en Tanzanie est prévue fin 2025.
Afrika Stratégies France avec RFI