PARIS (Reuters) – Le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, a défendu vendredi l’interpellation musclée de 151 jeunes, dont beaucoup de lycéens, jeudi à Mantes-la-Jolie (Yvelines), qui a suscité des réactions indignées sur fond de fronde des “Gilets jaunes”.
Des images de ces interpellations diffusées sur les réseaux sociaux montrent des dizaines de jeunes à genoux, mains derrière la nuque ou menottées dans le dos, parfois alignés contre un mur, sous la garde de policiers casqués en tenue anti-émeute.
Lors d’une conférence de presse sur les dispositifs de sécurité mis en place pour samedi pour la nouvelle mobilisation des “Gilets jaunes”, Christophe Castaner a reconnu que ces images étaient “dures” et s’est engagé à faire “toute la transparence” sur cet épisode.
“Nous devons être exemplaires (…) et toute la procédure sera évaluée sous contrôle de la justice”, a dit le ministre, qui a tenu à replacer l’opération dans le contexte de violences que Mantes-la-Jolie a connu depuis lundi.
Des incidents se sont notamment développés aux abords de deux lycées proches du quartier du Val-Fourré, réputé pour le climat de tension qui peut y régner.
Selon le ministre, les lycéens ont été rejoints au fil des jours “par une centaine d’individus encagoulés, armés de bâtons et d’engins incendiaires”, qui se sont livrés à de “véritables violences urbaines” – barricades enflammées, automobilistes agressés, saccage de pavillons, vols de bouteilles de gaz …
“Juste avant ces interpellations, ces bouteilles de gaz (…) ont été jetées robinet ouvert sur des barricades enflammées”, a-t-il ajouté. “C’est dans ce cadre-là que nos forces de l’ordre sont intervenues.”
Selon le ministre, 44 policiers et 31 lycéens ont été blessés au cours des violences des derniers jours et deux membres de l’Education nationale ont été aspergés d’essence.
700 INTERPELLATIONS DE LYCÉENS EN FRANCE
Au total, 151 personnes ont été interpellées sur Mantes-la- Jolie et la garde à vue de 145 d’entre elles devait être prolongée, a précisé Christophe Castaner.
Selon une source policière, 37 des jeunes arrêtés pour participation à un groupement en vue de la préparation de violences, de dégradations et destructions étaient cagoulés, en possession de matraques, battes de base-ball, barres de fer et bombes lacrymogènes.
L’avocat Jean-Pierre Mignard a annoncé qu’il allait saisir le Défenseur des droits, Jacques Toubon, a décidé d’ouvrir une enquête sur les conditions dans lesquelles se sont déroulées des interpellations de lycéens à Mantes-la-Jolie.
Dans un communiqué, Jacques Toubon rappelle qu’il avait, dans un rapport publié en décembre 2017, notamment recommandé le retrait des lanceurs de balles de défense de la dotation des forces chargées du maintien de l’ordre.
“Il est inadmissible de mettre en scène l’humiliation de jeunes lycéens dont beaucoup manifestent en raison des inquiétudes qui pèsent sur leur avenir”, a pour sa part déclaré dans un communiqué l’association SOS racisme.
“On n’a évidemment pas envie de voir des images de ce type-là”, a dit la ministre des Transports, Elisabeth Borne, à Sud-Radio, avant cependant de faire valoir qu’il ne s’agissait pas de lycéens “qui manifestaient pacifiquement”.
Interrogé par France Inter, le ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, a jugé ces images “choquantes” mais a également justifié l’action de la police.
Il a notamment souligné que les “éléments extérieurs aux lycées” mis en cause, parfois venus d’autres départements, avaient souvent plus de 20 ans et avaient notamment amené en fourgonnette des poubelles pour bloquer les lycées.
Au total, quelque 700 lycéens ont été interpellés jeudi en France, a-t-on précisé à Reuters de source policière.
Dans les seules Yvelines, ce sont 189 jeunes qui ont été mis en garde à vue jeudi, dit-on de source judiciaire.
Environ 300 lycées ont été affectés jeudi par le mouvement naissant des lycéens en France, dont 80 ont été bloqués, a pour sa part déclaré Jean-Michel Blanquer.
Emmanuel Jarry, avec Marine Pennetier et Gilles Guillaume, édité par Yves Clarisse