Les exportations africaines vers les marchés mondiaux ont affiché un bond record de 42% entre octobre 2020 et octobre 2021, soit plus du double des expéditions de l’Amérique (+17%) et de l’Asie (+17%) et presque quatre fois celles de l’Europe (11%), selon le rapport fraichement publié par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur l’état du commerce mondial. Ceci, quand les exportations globales ont augmenté de 16% sur la période.
Energies fossiles, pierres précieuses mondiales, largement demandées
En termes de secteurs, les matières premières minérales et minières ont dominé les exportations mondiales avec une hausse de 46% sur la période, avec une hausse de 81% des ventes de combustibles fossiles (pétrole, gaz naturel et charbon), passées à 147 milliards de dollars en octobre 2021, contre 81 milliards de dollars en octobre 2020. Les expéditions mondiales de pierres précieuses (or, argent, platine, rhodium, palladium…) ont bondi de 115% à 21 milliards de dollars en octobre 2021 contre 9,7 milliards de dollars en octobre 2020.
Par ailleurs dynamiques à une moindre mesure, les exportations mondiales de produits agricoles, halieutiques et alimentaires ont augmenté de 13%, tandis que les ventes à l’étranger de produits manufacturés ont progressé de 12% sur la période.
Ressources minérales et minières, deux pôles majeurs de l’export africain
Il apparait donc clairement que la « super-performance » africaine est principalement portée par ses ressources minérales et minières. L’OCDE ne dévoile pas encore tous les chiffres détaillés sur la période étudiée, mais les données historiques annuelles disponibles montrent que les combustibles minéraux, les huiles minérales et les matières bitumineuses… représentent depuis de nombreuses années les premières exportations en valeur du continent africain. A titre d’exemple, celles-ci ont atteint environ 111 milliards de dollars sur toute l’année 2020, légèrement écornées par la crise. Le Nigeria, l’Angola, l’Algérie, l’Afrique du Sud, la Libye, l’Egypte, le Congo, le Ghana, le Gabon et la Guinée équatoriale forment le top 10 des exportateurs depuis 2016. Leurs principaux clients sont, entre autres, l’Inde, la Chine, les Etats-Unis, la France, l’Espagne, l’Italie, le Portugal, les Pays-Bas ou encore la Grèce. Les clients africains n’arrivent que plus loin sur la liste.
Les perles fines ou de culture, les pierres gemmes ou semi-précieuses, les métaux précieux, plaqués ou doublés de métaux… constituent, quant à eux, le deuxième pilier des exportations africaines, selon la base de données de l’OCDE. Sur toute l’année 2020, la valeur de ventes est restée stable à 51,7 milliards de dollars, malgré la difficile conjoncture. L’Afrique du Sud, le Ghana, le Botswana, le Burkina Faso, la Tanzanie, l’Egypte, l’Ouganda, le Mali et la Guinée forment le top 10 des exportateurs depuis sept ans. Une sélection qui sera cependant probablement revue prochainement au vu de la situation politique qui prévaut au Burkina Faso, en Guinée, ainsi qu’au Mali qui est sous sanctions de la CEDEAO. Les clients de ces pays sont, entre autres, les États-Unis, le Japon, le Royaume-Uni, la Chine, l’Allemagne, la Suisse, l’Inde, les Emirats arabes unis, Singapour, Israël ou encore la France.
D’autres matières premières restent considérablement exportées : le cuivre (la République démocratique du Congo au premier rang avec 18,1 milliards de dollars d’exportations en 2020, contre 15,5 milliards en 2019) ; le cacao (la Côte d’Ivoire et le Ghana en tête, suivis du Cameroun) ; le café (dominé par le Kenya) ; l’aluminium (avec l’Afrique du Sud, le Mozambique, l’Egypte, le Maroc et la Cameroun dans le top cinq) ; le bois (Cameroun, Gabon, Afrique du Sud, Congo, Ghana).
Même si freinées par la crise, les exportations de véhicules autres que le matériel roulant des chemins de fer ou des tramways et accessoires constituent un pôle dynamique, tiré par l’Afrique du Sud et le Maroc. Ces derniers expédient notamment vers l’Allemagne, la Belgique, le Royaume-Uni, les Etats-Unis, la France, en l’Espagne ou l’Italie. Idem pour le secteur des machines et équipements électriques, enregistreurs et reproducteurs de son…, dominé par le Maroc, suivi de loin par la Tunisie et l’Afrique du Sud et à moindre mesure le Botswana.
A quand l’industrialisation générale des pays africains ?
En somme, la performance du continent africain à l’export d’octobre 2020 à octobre 2021 qui repose largement sur les expéditions de matières premières à l’état brute, pose à nouveau la problématique de l’industrialisation du continent érigée en urgence par les agendas de développement des Nations Unies et de l’Union africaine.
Si certains pays semblent présenter des plans stratégiques ambitieux, leur concrétisation, de manière générale, tarde. La République démocratique du Congo (RDC) a annoncé récemment son projet de fabrication de batteries électriques pour véhicules afin de tirer parti de ses importantes ressources en cobalt. Le Congo Brazzaville, qui assure la présidence de l’Opep en 2022, prévoit également un vaste projet industriel pour le développement d’une chaine de valeur au sein du secteur pétrolier et gazier, comme révélait récemment dans un entretien exclusif avec LTA Bruno Itoua, ministre des Hydrocarbures. Les projecteurs restent braqués sur de telles initiatives pour voir si elles sont finalement concrétisées.
En attendant, le secteur privé prend le taureau par les cornes avec, entre autres, la méga-raffinerie et complexe pétrochimique d’Aliko Dangote au Nigeria. Cependant, l’Afrique, c’est 54 pays. Au regard de leurs richesses naturelles qui font actuellement du continent le champion du monde de l’export, la dynamique industrielle de chaque pays n’est-elle pas nécessaire pour former un tout beaucoup plus « explosif » sur le grand marché commercial mondial ?
Afrika Stratégies France avec La Tribune Afrique