L’Isie, l’autorité électorale tunisienne, a annoncé lundi que le taux de participation définitif au second tour des élections législatives de dimanche était de 11,4%. Un niveau historiquement faible dont le président Kaïs Saïed a minimisé l’importance dans une vidéo diffusée lundi soir.
Près de 90 % d’abstention. Le second tour des élections législatives tunisiennes, dimanche 29 janvier, a connu un taux de participation de 11,4 %, a annoncé l’autorité électorale du pays, l’Isie, lundi 30 janvier.
Historiquement bas, le taux de participation est le plus faible enregistré depuis la révolution de 2011 ayant renversé le dictateur Ben Ali et marqué l’avènement de la démocratie dans le pays.
« Il faut interpréter ce taux différemment. 90 % n’ont pas voté parce que le Parlement ne représente rien pour eux », a minimisé le président Kaïs Saïed dans une vidéo, diffusée dans la soirée de lundi.
Certains scrutins des 12 dernières années ont recueilli près de 70 % de participation, comme les législatives d’octobre 2014, même si l’affluence est en baisse ces dernières années.
Au total, « 895 002 personnes » ont voté sur 7,85 millions d’inscrits, a précisé le président de l’Isie, Farouk Bouasker, soit 11,4 % (contre 11,3 % annoncés dimanche soir sur la base de données provisoires). Farouk Bouasker a donné un autre taux de 14,6 %, prenant en compte uniquement « les inscrits volontaires » sur les listes électorales, soit 5,8 millions de personnes, les autres ayant été enregistrés automatiquement à leurs 18 ans.
L’Isie a ensuite énuméré les noms des vainqueurs pour chacune des circonscriptions, sur lesquels il est impossible de tirer des conclusions, puisque les candidats – pour la plupart inconnus – avaient l’interdiction d’afficher leur affiliation politique.
Réduction considérable du rôle du Parlement
Les experts ont expliqué la faible participation par le boycott unanime du scrutin de la part des formations d’opposition, mais aussi par un désintérêt pour la politique d’une population focalisée sur la détérioration des conditions économiques (inflation galopante et pénuries récurrentes de produits de base).
Les législatives du 17 décembre et du 29 janvier sont l’une des dernières pierres que le président Kaïs Saïed a voulu poser dans l’édification d’un système ultraprésidentialiste similaire à celui d’avant la chute de Ben Ali.
Arguant d’une ingouvernabilité du pays, il avait limogé son Premier ministre et gelé le Parlement le 25 juillet 2021, avant de le dissoudre puis de réformer la Constitution l’été passé lors d’un référendum déjà boudé par les électeurs (30,5 % de participation), pour abolir le système parlementaire hybride existant.
Le futur Parlement, formé aussi d’un Conseil national des régions – encore à désigner –, voit ses prérogatives considérablement réduites. Il ne pourra renverser le gouvernement qu’au terme de deux motions de censure adoptées aux deux tiers des deux chambres et ne pourra jamais destituer le président. Il faudra dix députés pour proposer un projet de loi et les textes soumis par le président seront votés en priorité.
Remaniement partiel
Dans la soirée de lundi, la présidence tunisienne a par ailleurs annoncé le limogeage des ministres de l’Agriculture et de l’Éducation, sans donner d’explications, dans un contexte de pénuries de produits de base, dont le lait, et de grèves sporadiques dans l’enseignement.
Le président Kaïs Saïed a décidé « un remaniement partiel en nommant Mohamed Ali Boughdiri comme ministre de l’Éducation » en remplacement de Fethi Sellaouti, a annoncé un communiqué de la présidence. Le ministre de l’Agriculture Elyes Hamza a été remplacé par Abdelmomen Belati, a ajouté la présidence.
Afrika Stratégies France avec AFP